CONNAITRE GUSTAVE CAILLEBOTTE |
UN HOMME MULTIPLE |
La personnalité de Gustave Caillebotte est fascinante. Homme aux multiples intérêts, il était l’anti-modèle du velléitaire. Grâce à l’aisance financière héritée de sa famille, il s’est toujours investi à fond et donné les moyens de satisfaire ses passions, que ce soit dans le domaine de l’art ou dans la pratique du jardinage ou du nautisme. Réaliste et organisé, généreux et modeste, il s’est dévoué avec constance à la cause de la peinture nouvelle quand celle-ci en avait le plus besoin et il est permis de penser que sans Caillebotte, l’impressionnisme n’aurait pu avoir la reconnaissance et l’influence qui allaient lui permettre de renouveler l’art pictural de l’époque.
L’ARTISTE
PEINTRE
Après des études de droit, Gustave Caillebotte bifurqua très tôt vers la peinture. Il peignit ses premières
œuvres dans la propriété d’Yerres près de Paris où la famille
passait la belle saison. Il visita la première exposition impressionniste
de 1874 et il eut ainsi l’occasion, alors qu’il n’avait que 26 ans,
de faire la connaissance des peintres de la nouvelle école qu’il allait
fréquenter toute sa vie.
Il ne s’est jamais considéré lui-même comme
un grand artiste. Et le fait qu’il fût riche et
n’avait pas besoin de vendre pour vivre n’était pas pour le
promouvoir sur le devant de la scène impressionniste, au contraire de ses
amis qu’il encourageait par tous les moyens. Sa disparition prématurée
et sa production couvrant une vingtaine d’années seulement - par
ailleurs irrégulière du fait des autres activités auxquelles il
s’adonnait selon les saisons et les circonstances - font que jusqu’à
une période récente il n’a pas été accordé à Gustave Caillebotte
la place qu’il mérite dans le mouvement impressionniste.
LE
MECENE ET LE COLLECTIONNEUR
A la mort de son père, à
l’âge de 26 ans, Gustave Caillebotte hérita d’une large fortune
qu’il utilisa toujours à bon escient. Elle devait lui permettre de
vivre sans contrainte et de soutenir ses amis impressionnistes.
Ainsi dès 1876 il acheta une première toile à Monet (« Régates
à Argenteuil »), qui était à l’époque dans le besoin, lui prêtant
de l’argent et payant même le loyer de ses ateliers successifs. Des
achats au-dessus du prix normal allaient suivre, auprès de Renoir (« Le
bal du moulin de la Galette »), Pissarro, Degas et autres, jusqu’à
la dernière acquisition en 1883 d’une œuvre majeure : « Le
balcon » de Manet (dont la facture n'est pas sans rappeler celle de
ses propres oeuvres pré-impressionnistes).
Certaines expositions impressionnistes furent financées par Gustave
Caillebotte lui-même, qui sans sa générosité n’auraient sans doute
pas pu se tenir.
A la disparition de son frère René en 1876, Gustave Caillebotte qui
avait semble-t-il la prémonition d’une mort prématurée, avait rédigé
un testament par lequel il léguait à l’Etat la totalité des œuvres achetées à ses amis, soit 67 au total. Cette liste ne
comprenait aucune de ses propres œuvres, qu’il ne jugeait sans doute
pas dignes de figurer auprès de celles de Monet, Pissarro, Renoir ou
Degas. Ces œuvres forment aujourd’hui une part importante de la
collection du Musée d’Orsay. L
’ ORGANISATEUR
Gustave Caillebotte ne ménagea ni son temps ni sa peine pour
s’impliquer fortement dans l’organisation de cinq expositions
impressionnistes entre 1876 et 1882, réunissant les artistes, trouvant les
locaux, préparant les vernissages, allant jusqu’ à concevoir
l’accrochage des toiles présentées. Ses talents d’organisateur se manifestaient également dans d’autres domaines, jardinage, nautisme et même dans l’administration communale de Gennevilliers.
LE
PHILATELISTE Avec son frère Martial, Gustave avait constitué depuis sa jeunesse une vaste collection qui, au moment du mariage de Martial, fut vendue pour un prix considérable à un Britannique. Elle constitue aujourd’hui une part importante du fonds philatélique du British Museum.
LE
JARDINIER ET L’HORTICULTEUR
Dès la période d’ Yerres où la famille Caillebotte possédait une
propriété de 11 hectares comprenant en particulier un vaste potager, Gustave s’est
intéressé au jardinage, et sa peinture en donne plusieurs témoignages.
Plus tard, au Petit-Gennevilliers, sa maison était entourée d’un très
grand jardin et d’une imposante serre où il passait beaucoup de temps, plantant et
bouturant avec ses quatre jardiniers. Nombreuses sont les œuvres des
dernières années consacrées à ces capucines, chrysanthèmes et autres
orchidées. Les talents de jardinier de Gustave Caillebotte étaient reconnus par tous et des correspondances régulières s’échangeaient. Monet lui-même sollicita ses conseils quand il entreprit de concevoir son jardin de Giverny.
LE PLAISANCIER ET L’ARCHITECTE NAVAL
Vers le milieu du siècle, les sports nautiques, dont la mode était venue
d’Angleterre,
étaient très en vogue. A Yerres, la propriété familiale était bordée par la
rivière du même nom et les barques et périssoires y étaient nombreuses.
Gustave Caillebotte pratiquait assidûment ces activités avec ses amis et
à partir de 1877 il s'en empara pour brosser de nombreuses toiles. Mais à la mort de
sa mère la propriété fut vendue.
Entre-temps cependant il avait découvert avec Martial la plaisance sur la
Seine et était devenu membre du Cercle de Voile de Paris à Argenteuil
(il en deviendra vice-président en 1880) - c’est d'ailleurs sur le bassin d’Argenteuil
qu’il avait gagné sa première régate.
Conquis par l’endroit, il acheta une propriété au
Petit-Gennevilliers, sur la rive gauche de la Seine face à Argenteuil. A
son habitude, Caillebotte, se donnant pleinement les moyens d’assouvir
sa passion, agrandit la propriété et créa un chantier naval près de sa maison. Il y dessina
de nombreux plans de voiliers, en construisit
certains, et gagna lui-même de nombreuses compétitions.
Aujourd’hui encore, on se souvient de son « Roastbeef » et
de son « Lézard », dont des répliques ont récemment été
construites. Le Cercle de Voile de Paris ne se cantonnait pas à la Seine ; à la belle saison il organisait également des régates en Normandie et en Bretagne. Là encore, Caillebotte s’illustra, notamment sur le « Dahud » qu’il avait dessiné pour la mer et qui remportait la plupart des compétitions, notamment en 1893 à Saint-Malo. Enfin, c'est sur ces côtes que Caillebotte devait initier Paul Signac à la navigation.
Vue aérienne de la Seine à Gennevilliers et Argenteuil
LE
CITOYEN Peu de temps après s’être établi définitivement à Gennevilliers, Gustave Caillebotte fut élu au Conseil Municipal. Et comme à son habitude, il ne fit rien à moitié : il s’investit à fond dans la gestion de la commune, et pour pallier aux lenteurs administratives, alla jusqu’à payer sur ses propres finances l’éclairage public, la réfection de voies publiques et l’uniforme des pompiers !
DISPARITION Sa disparition fut durement ressentie par tous ses amis et par la critique qui ne l'avait pas toujours ménagé. L'exécution de son testament allait défrayer la chronique pendant de nombreuses années et occulter quelque peu le peintre de talent qu'il avait été.
Il repose aujourd'hui au cimetière
du Père Lachaise à Paris. |